lundi 28 janvier 2019

Ce que je peux enfin vous dire de Ségolène Royal

«  On voit bien que ç’a été parfois très violent pour vous. Mais vous n’avez rien dit. Comment fait-on pour tenir  ?  »
Au moment où la parole des femmes se libère enfin, beaucoup d’entre elles m’ont demandé de m’exprimer sur ce qu’une femme en politique subit en silence. Et de plus en plus d’hommes me disent  : parlez pour nos filles, nos compagnes, nos sœurs. Je me suis donc accordé ce droit de dire, et ce droit est vite devenu un devoir. La raison du silence des femmes, c’est la peur de l’humiliation. Ce fut difficile, et parfois douloureux d’écrire, car il a fallu que je revive des épreuves que j’avais rangées dans ma mémoire frigorifiée.
Mais, m’a-t-on dit, ayant été la première femme de l’histoire de France à accéder au second tour de l’élection présidentielle, vous deviez prendre la parole pour faire avancer la cause des femmes et poser des repères. Et en plus, j’ai appris de ma longue expérience des combats écologiques la ressemblance entre les violences faites aux femmes et celles faites à la nature, avec des prédateurs qui maltraitent, salissent, exploitent, trop souvent en toute impunité. Le même vocabulaire. La même loi du silence. C’est donc pour accélérer l’action que j’ai décidé de faire entendre ma voix et celles qui n’ont pas pu se faire entendre.
Respect de la nature, respect des femmes  : et s’il y avait là une réponse aux deux fléaux qui frappent aussi bien la planète que l’action politique, la déshumanisation et le déracinement ?
Ségolène Royal


Mon avis :
C'est extrêmement rare pour moi de lire un livre écrit par une personnalité politique sans m'ennuyer ferme au bout de 3 pages, alors c'est une première chronique dans ce domaine ! Mais quand on me l'a recommandé, j'ai dit pourquoi pas ?
Et bien je n'ai pas été déçue, je peux même le recommander à mon tour !

Ce témoignage est bien écrit, se lit vite et facilement.
Même si dans le monde politique, on peut se douter que ce n'est pas mieux qu'en entreprise ou au bistrot du coin, on pourrait penser que les comportements dûs aux fonctions occupées seraient plus sérieux...Mais en fait pas du tout, les propos sexistes et machistes sont plutôt ceux de la cour d'un collège ! A l'époque où Ségolène est élue députée en 1988, ce n'est pas encore la mode de la parité et les femmes devaient rester à la maison, ce qui fait qu'elle en a entendu des vertes et des pas mûres sur le fait d'être une femme en politique. Parce qu'une femme c'est forcément une ravissante idiote juste bonne à satisfaire ces messieurs ! Elle rapporte les insultes et moqueries jusqu'au sein de l'hémicycle et c'est absolument minable ! On comprend mieux pourquoi on en est encore à #metoo ou #balancetonporc.
On ne lui a pas fait de cadeaux mais elle ne lâche pas ses principes, ses valeurs. Et c'est avec courage et détermination qu'elle résiste, certaine d'être légitime dans les différentes fonctions qu'elle occupera, et ce même quand elle sera rabaissée dans son propre camp politique. Elle travaille, met ses équipes au boulot, et parce qu'elle est une femme, elle doit toujours en faire plus, pour prouver aux hommes qu'elle a sa place et que ses idées peuvent être bonnes. J'ai souvent entendu dire que ce n'était pas facile de bosser avec elle, je comprends mieux pourquoi, elle a dû secouer quelques hauts fonctionnaires 😄 Elle voulait servir son pays, se rendre utile alors qu'on lui disait que ça n'allait lui servir à rien !
Elle donne de nombreuses anecdotes sur les coulisses du pouvoir, les accords, les rendez-vous secrets, les préparations de réunions, la pression des lobbies. Le plus écoeurant est celui du glyphosate : il a fallu un groupe de femmes députées européennes courageuses pour voter contre le renouvellement de l'autorisation du glyphosate en 2016, alors qu'on leur disait de voter le contraire ! On sait malheureusement que cette autorisation a de nouveau été renouvelée. Elle parle aussi de Notre-Dame des Landes, des boues rouges toxiques, de l'huile de palme et du puissant Ferrero, et de plusieurs autres sujets liant écologie et lobbies.
Si certains pouvaient encore ignorer cette connivence, ils comprendront mieux pourquoi rien ne peut avancer en matière d'écologie, les lobbies sont trop puissants et avec l'argent, on achète tout.
Elle a tout de même réussi à laisser quelques actions positives, comme l'excellence écologique du Poitou-Charentes, le congé paternité ou l'accord de Paris. Elle s'est imposée le non-cumul des mandats, 10 ans avant la loi.
En tant que fonctionnaire territoriale, je savais déjà tout ce qu'elle avait fait en tant que présidente de la Région Poitou-Charentes, et je n'ai pu qu'approuver sa volonté de suppression des pesticides dans les communes, 10 ans avant la loi. Et même si elle n'en parle pas spécifiquement, je me souviens que les communes et les associations pouvaient demander et obtenir des subventions de la région. Ce qui n'est bien sûr plus le cas avec la nouvelle grande région Nouvelle-Aquitaine ! Et il ne faut pas croire qu'ils font des économies, simplement tout reste en Aquitaine...Et pour ce qui est de se faire une idée de la gestion du Conseil régional d'Aquitaine, il n'y a qu'à lire les livres de Zoé Shepard, c'est très instructif !!
Mais bref, tout ça pour dire que Ségolène avait quelques longueurs d'avance, certainement parce qu'elle est une femme et que les femmes sont en général plus sensibles à leur environnement, à ce que mangent leurs enfants, à l'air qu'ils respirent...
Elle évoque également son rôle de mère, d'épouse trahie dans un jeu de questions-réponses, où elle dévoile ses émotions, ses sentiments, ses réactions.

Courage, simplicité, vérités, engagement, autant de mots qui résument son "parcours de la combattante" et une citation qui résume bien le livre "On gagne toujours en liberté quand on refuse de transiger avec ses valeurs".

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